Le Monde Afrique a organisé le 23 février dernier la seconde édition des « Débats Monde Afrique », au musée du Quai Branly, à Paris. Le débat a été ouvert par le Directeur du Monde Jérôme Fenoglio et Serge Michel, rédacteur en chef du Monde Afrique. Le thème principal : la femme africaine, symbole de force et de courage qui reste un modèle phare au niveau international. Pilier et garante de la société, la femme africaine suscite de l’admiration. « Avant le colonialisme, en Afrique, la femme était leader, elle avait un rôle clé reconnu de tous» Leymah Gbowee, activiste et prix Nobel de la paix.
Les intervenants
Pour commencer, Thierry Michel, réalisateur de L’Homme qui répare les femmes a donné son point de vue sur la femme congolaise : « la femme est toujours battue, combattue mais jamais abattue. »
L’écrivain nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, le Vice Président de la Banque Mondiale pour l’Afrique Makhtar Diop, la ministre de la santé du Sénégal Awa Marie Coll Seck, l’entrepreneuse sénégalaise Magatte Wade, la militante libérienne et Prix Nobel de la Paix Leymah Gbowee, la candidate à l’élection présidentielle de la Somalie Fadumo Dayib, l’entrepreneuse sociale et lauréate des Rolex Awards of Enterprise Bruktawit Tigabu, la chargée des relations extérieures et des questions de genre de l’AFD Safia Otokore, ou encore la responsable des politiques publiques de Facebook en Afrique, Ebele Okobi.
Ainsi qu’une invitée surprise, Fatou Bensouda, procureure générale de la Cour pénale internationale (CPI). Sans oublier les performances musicales de Patricia Essong en deuxième partie et de Salif Keita pour clôturer.
Des thèmes forts et des conseils à saisir
La femme au cœur du développement est le moteur de l’Afrique. Selon les différentes interventions, la femme africaine a été mise à l’honneur. Quand elle décide de s’impliquer, la femme fait toujours la différence. Il faut « investir dans l’éducation pour assurer une société plus juste».
Parmi les batailles de la femme, le droit à la santé et le droit aux soins sont fondamentaux. Liya Kebede, top-modèle éthiopienne a créé une fondation en 2006 pour lutter contre la mortalité maternelle. 830 femmes meurent chaque jour dans le monde à la grossesse ou à l’accouchement.
L’autre bataille est l’émancipation de la femme selon l’écrivain nigériane Chimamanda Ngozi Adichie. Elle a d’ailleurs donné une très bonne leçon sur le féminisme qui a été applaudie par le public : « own yourself » (soyez les entrepreneures de vous-mêmes et possédez-vous vous-même), « le féminisme, c’est la justice, plus de justice dans le monde. »
Les femmes et l’économie : « Les femmes sont considérées comme les plus fiables par les banques», selon les statistiques de la Banque mondiale. Elles sont indispensables dans la croissance du continent.
Fadumo Dayib, première femme candidate à l’élection présidentielle de Somalie : un défi remarquable
Lorsqu’une femme se lève pour tout un pays avec pour seul but, la paix, on reste sans voix. Surtout que la Somalie est aux mains du groupe islamiste Shebab. C’est avec beaucoup de douceur et de calme qu’elle explique ses convictions : « Mon but est de faire bouger les fondements en Somalie afin que les futures générations vivent dans un monde meilleur. » Consciente du danger et du manque de sécurité, sa candidature dérange et elle le sait. Mais sa soif de justice dépasse toutes les intimidations.
« Il faut rectifier la situation en Somalie parce que les générations de mes parents ont été détruites, je veux ramener la paix en Somalie. Je ne vois pas les obstacles, je me réveille et je m’endors avec une vision, celle d’un pays avec une sécurité. Je reste focalisée sur ma vision pour atteindre mon but» conlut Fadumo.
Back to Africa
Le retour aux racines est de plus en plus palpable. Patricia Essong, jeune chanteuse d’origine camerounaise a abandonné le management et son rôle de consultant pour se consacrer à la musique africaine. Elle a d’ailleurs interprété plusieurs titres de son album Soul of nu bantu en plusieurs langues dont un titre en lingala. Et elle a lancé un message essentiel à la fin de sa performance musicale : « réapprendre à parler la langue.» Il y a comme une soif de retourner en Afrique et de renouer avec ce vaste continent. Notre jeune génération se réconcilie avec ses origines et partage sa culture avec assurance et fierté.
Magatte Wade, entrepreneure créatrice de la marque de cosmétiques de luxe Tiossan « origines », elle a quitté son poste de PDG en Californie pour se consacrer à sa marque au Sénégal. « Il y a chez les jeunes une fièvre qui les contamine, un besoin de retourner en Afrique. Pour vous raconter une anecdote, quand j’étais aux Etats-Unis, on m’appelait Frenchie donc j’ai fait un pacte avec Dieu en lui disant, Dieu à partir de maintenant, je veux que tout ce que je fais soit pour l’Afrique. Et depuis, c’est ce que je fais. J’étais si mal parce que culturellement, je n’existais pas. C’est alors, que j’ai créé une marque car c’est ce qu’il y a de mieux pour parler de sa culture. Cette année, on rentre en Afrique et ce qu’il faut c’est un nombre considérable d’africain qui crée de l’emploi. »
Pour finir
Erik Orsenna, écrivain et membre de l’Académie française a clôturé avec une touche d’humour et de littérature en énonçant six mots : « idée générale, volonté + énergie, éducation (des femmes), entreprise et le dernier mot liberté. » « Possédez-vous vous-mêmes » a-t-il déclaré en reprenant les propos de l’écrivain Chimamanda Ngozi Adichie
La dernière performance musicale très émouvante interprétée par Salif Keita, morceau dédidé à sa mère à l’attention de toutes les femmes.
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